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                                    1095Que faut-il dire aux hommes ?Ah ! quel %u00e9trange soir, ce soir, quel %u00e9trange climat. Je vois de ma chambre s%u2019allumer les fen%u00eatres de ces b%u00e2tisses sans visages. J%u2019entends les postes de radio divers d%u00e9biter leur musique de mirliton %u00e0 ces foules d%u00e9s%u0153uvr%u00e9es venues d%u2019au-del%u00e0 des mers et qui ne connaissent m%u00eame pas la nostalgie.On peut confondre cette acceptation r%u00e9sign%u00e9e avec l%u2019esprit de sacrifice ou la grandeur morale. Ce serait l%u00e0 une belle erreur. Les liens d%u2019amour qui nouent l%u2019homme d%u2019aujourd%u2019hui aux %u00eatres comme aux choses sont si peu tendus, si peu denses, que l%u2019homme ne sent plus l%u2019absence comme autrefois. C%u2019est le mot terrible de cette histoire juive : %u00ab Tu vas donc l%u00e0-bas ? Comme tu seras loin%u00a0%u00bb %u2014 Loin d%u2019o%u00f9 ? Le %u00ab %u00bb %u2014 Loin d%u2019o%u00f9 ? Le %u00ab%u00a0o%u00f9%u00a0%u00bb qu%u2019ils %u00bb qu%u2019ils ont quitt%u00e9 n%u2019%u00e9tait plus gu%u00e8re qu%u2019un vaste faisceau d%u2019habitudes. Dans cette %u00e9poque de divorce, on divorce avec la m%u00eame facilit%u00e9 d%u2019avec les choses. Les frigidaires sont interchangeables. Et la maison aussi si elle n%u2019est qu%u2019un assemblage. Et la femme. Et la religion. Et le parti. On ne peut m%u00eame pas %u00eatre infid%u00e8le : %u00e0 quoi serait-on infid%u00e8le ? Loin d%u2019o%u00f9 et infid%u00e8le %u00e0 quoi ? D%u00e9sert de l%u2019homme.Qu%u2019ils sont donc sages et paisibles ces hommes en groupe. Moi je songe aux marins bretons d%u2019autrefois, qui d%u00e9barquaient %u00e0 Magellan, %u00e0 la L%u00e9gion %u00e9trang%u00e8re, l%u00e2ch%u00e9s sur une ville, %u00e0 ces n%u0153uds complexes d%u2019app%u00e9tits violents et de nostalgie intol%u00e9rable qu%u2019ont toujours constitu%u00e9 les m%u00e2les un peu trop s%u00e9v%u00e8rement parqu%u00e9s. Il fallait toujours, pour les tenir, des gendarmes forts ou des principes forts ou des fois fortes. Mais aucun de ceux-l%u00e0 ne manquerait de respect %u00e0 une gardeuse d%u2019oies. L%u2019homme d%u2019aujourd%u2019hui on le fait tenir tranquille, selon le milieu, avec la belote ou le bridge. Nous sommes %u00e9tonnamment bien ch%u00e2tr%u00e9s. On nous a coup%u00e9 les bras et les jambes. Ainsi sommes-nous enfin libres de marcher. Mais je hais cette %u00e9poque o%u00f9 l%u2019homme devient, sous un totalitarisme universel, b%u00e9tail doux, poli et tranquille. On nous fait prendre %u00e7a pour un progr%u00e8s moral ! Ce que je hais dans le marxisme, c%u2019est le totalitarisme %u00e0 quoi il conduit. L%u2019homme y est d%u00e9fini comme producteur et consommateur, le probl%u00e8me essentiel %u00e9tant celui de la distribution. Ainsi dans les fermes mod%u00e8les. Ce que je hais dans le nazisme, c%u2019est le totalitarisme %u00e0 quoi il pr%u00e9tend par son essence m%u00eame. 
                                
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