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[La compagnie de Lazare - 63 Automne - %u00ae 2024]Litt%u00e9rature%u2014 Je te donne ma parole.Le Diable et le grand-p%u00e8re rest%u00e8rent ainsi de longues minutes, sans toutefois r%u00e9ussir %u00e0 sortir du dialogue de sourd qui ne faisait que se d%u00e9velopper depuis l%u2019instant m%u00eame de leur rencontre.Au bout d%u2019un moment, on sentit quand m%u00eame le grand-p%u00e8re pr%u00eat %u00e0 c%u00e9der, ou tout du moins %u00e0 baisser un peu la garde.%u2014 Je ne te crois toujours pas, murmura-t-il pourtant une derni%u00e8re fois dans un m%u00e9lange de fran%u00e7ais et de gascon qui, chez lui, manifestait toujours une forme primitive de confusion lorsqu%u2019une circonstance ext%u00e9rieure venait perturber la logique de son raisonnement. %u00c0 nouveau, il exprima le fond de sa pens%u00e9e :%u2014 Soit tu me mens, soit tu me caches quelque chose !Le Diable le fixa %u00e0 nouveau du regard. Le vieil homme %u00e9tait d%u00e9cid%u00e9ment plus coriace qu%u2019il ne l%u2019avait imagin%u00e9. Il joua lui aussi cartes sur table.%u2014 Tu te trompes, je ne te mens pas ! Mais c%u2019est tout de m%u00eame bien vu. Car pour %u00eatre parfaitement honn%u00eate avec toi, il est exact que si je te dis la v%u00e9rit%u00e9, je ne te dis pas toute la v%u00e9rit%u00e9%u2026%u2014 Ah ! fit alors le grand p%u00e8re, trop heureux de voir qu%u2019il avait bien, depuis le d%u00e9but, quelque raison de se m%u00e9fier.%u2014 Lorsque je te dis que je ne te demanderai aucune contrepartie, c%u2019est la stricte v%u00e9rit%u00e9, encha%u00eena le Diable. Ce que je ne t%u2019ai pas dit, en revanche, c%u2019est qu%u2019une fois ton v%u0153u exauc%u00e9, tout ce que je t%u2019accorderai, je l%u2019accorderai en double %u00e0 ton voisin.L%u2019argument, inattendu, avait fait mouche. %u2014 %u00c0 mon voisin ? Ce c%u2026 de voisin ? ne put s%u2019emp%u00eacher de l%u00e2cher le grand-p%u00e8re comme un cri du c%u0153ur.%u2014 Oui, r%u00e9pondit le Diable. %u2014 Mais pourquoi lui ? %u2014 Pourquoi pas ?%u2014 Et pourquoi en double ?%u2014 Et pourquoi pas ?Mon grand-p%u00e8re %u00e9tait %u00e0 court d%u2019arguments. Il comprenait bien la promesse qui lui %u00e9tait faite mais il visualisait surtout, presque instantan%u00e9ment, la menace qui se d%u00e9veloppait en parall%u00e8le. Avantager son voisin ? Cette seule pens%u00e9e lui %u00e9tait insupportable.Presque par r%u00e9flexe, il interrogea :%u00a0%u2014 Et si je te demande 100 hectares de terre%u2026%u2014 %u2026 je te les donnerai. Mais j%u2019en donnerai 200 %u00e0 ton voisin.%u00c0 nouveau, la menace effa%u00e7a la promesse. On vit m%u00eame un tr%u00e8s l%u00e9ger spasme parcourir le nez du vieux paysan, de la pointe %u00e0 la base, puis gagner progressivement tout le haut du visage et s%u2019amplifier, quasi-instantan%u00e9ment, sous la forme d%u2019un tremblement plus marqu%u00e9 jusqu%u2019%u00e0 la pointe du b%u00e9ret.