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[La compagnie de Lazare - 63 Automne - %u00ae 2024]17- Su%u00e8de As close as possibleCela fait plusieurs fois que je me rends en Su%u00e8de pour une s%u00e9rie de reportages pour Le Figaro. Ce pays plut%u00f4t tranquille, sorte de laboratoire d%u2019une Europe du nord qui fascine encore par son aust%u00e9rit%u00e9 et son s%u00e9rieux, est plus que jamais tent%u00e9, en ce printemps 1990, de rejoindre l%u2019Union europ%u00e9enne. Il lui faudra encore patienter 5 ans%u2026Apr%u00e8s une semaine de rendez-vous avec de nombreux responsables %u00e9conomiques, l%u2019un de mes contacts, tr%u00e8s introduit au plus haut niveau du pays, me propose une rencontre en tr%u00e8s petit comit%u00e9 avec%u2026 le Roi et la Reine.J%u2019imagine alors (%u00e0 tort%u2026) que le rendez-vous n%u2019apportera rien de nouveau %u00e0 mon reportage. La constitution du pays interdit en effet au Roi de s%u2019exprimer sur des questions d%u2019ordre politique. Mais pour n%u2019avoir jamais eu encore l%u2019occasion d%u2019interviewer un monarque, j%u2019accepte avec plaisir. Je serai, pour l%u2019occasion, accompagn%u00e9 de la correspondante locale de l%u2019Agence France Presse (AFP) et par St%u00e9phane Bern, alors tr%u00e8s peu connu du grand public mais qui couvre d%u00e9j%u00e0 les t%u00eates couronn%u00e9es pour Le Figaro Magazine (qu%u2019il faut bien distinguer du quotidien pour lequel je travaille).Le jour fix%u00e9 pour l%u2019interview, St%u00e9phane, me d%u00e9taille, avec sa gentillesse habituelle, la meilleure fa%u00e7on de m%u2019adresser au Roi ou de saluer la Reine. Mais je n%u2019ai, %u00e0 cet instant, d%u2019%u0153il que pour l%u2019employ%u00e9e du ch%u00e2teau, probablement membre du cabinet royal, charg%u00e9e de nous faire patienter dans l%u2019antichambre royale. Il fait dire que c%u2019est tout simplement une caricature de la beaut%u00e9 scandinave. Elle porte un pantalon noir, une veste noire et une simple chemise blanc immacul%u00e9. Je m%u2019imagine d%u00e9j%u00e0 la photographier en studio, sur fond blanc, dans une tenue moins formelle et plus romantique, avec un simple petit chapeau pour faire ressortir ses yeux clairs.Pas le temps d%u2019%u00e9piloguer car les portes de la salle de r%u00e9ception s%u2019ouvrent d%u00e9j%u00e0. Notre belle h%u00f4tesse s%u2019efface, laissant la place au Roi et %u00e0 la reine Silvia laquelle, %u00e0 peine remise d%u2019un accident de ski, s%u2019avance vers nous%u2026 en b%u00e9quilles (compliquant d%u2019autant le baise-main que j%u2019%u00e9tais d%u00e9j%u00e0 loin de ma%u00eetriser). Apr%u00e8s les salutations et les pr%u00e9sentations d%u2019usage, l%u2019interview commence. Au bout d%u2019un moment, je mets les pieds dans le plat et ose une question que tout le monde m%u2019avait recommand%u00e9 de ne pas poser : %u00ab Majest%u00e9, jusqu%u2019o%u00f9 comptez-vous vous rapprocher de l%u2019Europe ? %u00bb Et le Roi, apr%u00e8s avoir probablement tourn%u00e9 six fois sa langue dans sa bouche (au lieu des sept n%u00e9cessaires) finit par me sourire et me r%u00e9pondre : %u00ab As close as possible %u00bb.Le lendemain, cette petite phrase reprise par les journaux, provoquera un v%u00e9ritable s%u00e9isme national. Au point que des dizaines de journalistes su%u00e9dois chercheront %u00e0 m%u2019interviewer %u00e0 mon tour pour savoir si le Roi, qui avait selon eux outrepass%u00e9 son r%u00f4le de monarque, avait vraiment prononc%u00e9 cette phrase rapport%u00e9e par l%u2019AFP. Le Roi voulait se rapprocher de l%u2019Europe ? Impossible de leur expliquer que moi, c%u2019est plut%u00f4t de sa charmante conseill%u00e8re que j%u2019aurais voulu %u00eatre %u00ab as close as possible%u2026%u00bbDans les antichambres du Palais, en attendant le Roi%u2026 %u00a9 Christophe Labarde